La critique absurde

La critique absurde

Sisyphe, Franz von Stuck, 1920

« Ce sont les philosophes ironiques qui font les œuvres passionnées ».

Albert Camus

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  • Albert Camus est à l’honneur. Albert Camus et Raymond Aron, deux mentors pour une pensée authentiquement critique, pleine de nuances, aux antipodes des manichéismes et des simplifications abusives… Nonobstant le fait qu’il n’est jamais bon de mettre en avant des grands noms en guise de remèdes, n’oublions pas qu’il y a toujours plus de sens à tirer d’un philosophe sérieux que ce qu’en dit la vulgate.

 

  • Albert Camus, par exemple, sera convoqué contre Sartre pour tempérer les excès d’une parole fascinée par l’engagement et la radicalité. Alors que le formalisme démocratique se paye de mots, qu’il se contemple, Albert Camus rappelle pourtant à son lecteur attentif  que « l’art ne peut être si bien servi que par une pensée négative. » (1) Ou commence la négation ou finit-elle ? Vous ne trouverez pas de normes définitives dans Camus pour répondre à cette épineuse question. Le philosophe vous laisse seul avec votre petite angoisse du jour, libre de faire avec le négatif comme bon vous semble.

 

  • Évidemment, ce n’est pas ainsi que les normopathes de l’heure lisent Camus car ils le lisent contre. Contre Sartre, dis-je, mais tout autant contre le manichéisme, les nouvelles radicalités, le conflit qui ne se paye pas de mots, l’engagement intellectuel un peu coûteux. Ils utilisent Camus comme un par-feu, ce qui est certainement la pire façon de lire un philosophe dirait Deleuze. Il ne pense pas à partir de lui mais s’autorise de lui pour empêcher la pensée de se frayer un chemin sur des voies nouvelles, de prendre les temps à rebrousse-poils. Non pas nier pour nier mais pour tenter autre chose.

 

  • « Mener de front ces deux tâches, nier d’un côté exalter de l’autre, c’est la voie qui s’ouvre au créateur absurde. Il doit donner au vide ses couleurs. » (2) Qui ne voit pas l’absurde contenu dans cette dernière volonté : vouloir dire encore quelque chose en se risquant sur le terrain miné d’une pensée négative. Non pas empêcher d’être, l’époque est ici experte, mais tout faire pour « maintenir la conscience ». La philosophie n’a-t-elle d’autre vocation que celle-ci ? D’elle, tout découle. Le politique en particulier. Que peut-être un ordre politique qui prétendrait se maintenir au détriment de la conscience ? Nous en sommes pourtant là.

 

  • Ne reste de la conscience qu’un immense renoncement exténué : comment se peut-il, cette critique ignorerait-elle la stérilité de l’effort ? Nous finissons par appeler conscience l’antichambre de la résignation, attenante à l’acceptation de ce qui est, à sa justification. C’est ainsi que les penseurs les plus conformistes, ceux qui ne font que parfumer l’air du temps, peuvent passer pour philosophes. Armés d’une superdoxa, leur fonction consiste à conforter les plus stériles. N’ayez crainte, nous soufflent-ils, ceux qui bougent encore un peu le font pour « rien », la place est sans issue, rassurez-vous. Venez prendre votre dose de « ni dieux, ni maîtres » ou de morale provisoire dans les boudoirs de la culture. Pas de quoi gâter la digestion.

 

  • Que pouvons-nous faire de notre insatisfaction ? Une morale provisoire ? Un hédonisme de pacotille ? Une révolte consommée ? La question n’est pas théorique, encore moins formelle. La superdoxa nous répond démocratie, liberté, progrès, tempérance. La superdoxa se situe du côté de l’offre et elle biffe la question. Ceux qui portent une pensée lucide font toujours retour sur eux-mêmes et mettent plus que des formes irréelles sur le tapis. « A un certain point où la pensée revient sur elle-même, écrit Camus, ils dressent les images de leurs œuvres comme les symboles évidents d’une pensée limitée, mortelle et révoltée. » (3) Pour rien mais autrement.

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(1) Albert camus, Le mythe de Sisyphe, La création absurde.

(2) Op. cit.

(3) Op. cit.

Aux pervers des démocraties de marché

Aux pervers des démocraties de marché

Foule haineuse dispersée

  • N’être plus que la grimace de ce monde. Un spectre dans la grande machine à lénifier. Une vilaine satire qui ne ménage ni la chèvre ni le chou. Rappelons que la critique n’a pas vocation à être un énième aggiornamento acceptable de la contestation, une de ces mises en spectacle de l’indignation qui ménage soigneusement le copinage dans un jeu de renvois de courtoisies, assez odieux avec l’âge je dois dire. Nous ne jouons pas le jeu, voilà le seul jeu qui puisse valoir encore. En cela, nous ressemblons bien à ces canailles de gilets jaunes, décidées, dans deux jours, dans deux mois, dans deux ans, en jaune ou en couleur de lune, à barbouiller salement le paradis proposé. Les bonnes âmes nous offrent un débat. Merci bien. Sans décourager personne, nous n’avons pas la gueule à ça.

 

  • Est bon ce qui résiste, c’est notre seul critère. Difficile à tenir par les temps. Rien au-delà des démocraties libérales, dites-vous ? Nous voilà donc au paradis. Mais la théologie n’a jamais été très loquace sur les occupations du ciel. Il se trouve que votre paradis, mesdames, messieurs les tempérés, nous emmerde. Je n’ai, entre autres exemples, aucune envie de participer à la formation science du numérique et polyvalence pour former des grappes de neuneus encore plus neuneus que les précédentes. Je n’ai aucune appétence à donner mon avis autour d’une table en plexi pressé par un speaker hystérique et une speakerine perverse. Je ne goûte pas l’idée de miauler en meute avec les chatons du spectacle. Mais il se trouve, et je ne suis pas le seul, que je veux vivre encore. A y réfléchir cette saine exigence est de moins en moins évidente à tenir en conservant aussi sa santé mentale.

 

  • On nous dit chagrins, méprisants, aigris et nostalgiques ? Je soutiens au contraire que nous sommes les derniers à pouvoir nous marrer encore. Certes, ce rire est parfois contrarié, oblique, en dedans, question d’intimité ; la diagonale du fou n’est pas exempte de rechute. Vous appelez information libre ce que nous nommons dressage. Sûrement jouissif, quand on ne peut plus jouir autrement, de voir à quel point les masses disciplinées peuvent rentrer dans le rang au premier coup de sifflet. Les pitreries en fiches d’un théâtreux de salons devant des parterres grisonnants vous tiennent lieu de débat et c’est à nous que vous osez proposer la camisole du fou ? Des pontifiants emperruqués vous sortent de vieux mythes dans des croisières philo et c’est à nous que vous posez l’entonnoir ? Mes bons amis, vous appelez pluralisme un marécage que je nomme étalement de bouses séchées. Les nuances dépendent de la nature des bouses, anecdotique quand on a les pieds dedans.

 

  • Vous peinez, cela commence à se voir, à sauver la diversité des apparences. Votre pluralisme chéri pourrit sur pieds. Curieusement, à court d’expédients pour vendre une énième sauce, le ton se durcit. Votre fine sensibilité aux nuances trouve ses limites naturelles quand il s’agit de ramener à la raison, la vôtre, ceux qui ne veulent plus patauger dans votre bourbier progressiste en silence. On vous entend même promettre du sang et des larmes à ceux qui ont tendance à dévier du droit chemin par un mauvais vote, une occupation sauvage de l’espace, une mauvaise gestuelle. Un œil par ici, un trauma par là, des broutilles quand il s’agit de ramener quelques brebis égarées dans le concert de louanges de leur servilité consentie. Car la fine fleur de l’avilissement ne consiste pas pour vous à soumettre mais à faire se soumettre les soumis entre eux en participant eux-mêmes à leur propre spoliation. Il me semble, sans trop me tromper, que cela correspond à une structure perverse. C’est dans Freud, lisez.

 

  • Quand la réalité dépasse la satire, autant dire quand la réalité s’évapore, avons-nous d’autres choix que de nous risquer tout entier. Ne pas jouer au philosophe, à l’intellectuel, au critique quand tout le monde joue à ce jeu-là. Court-circuiter ces insignifiants montages dans lesquels le goût pour le fake rencontre celui, plus français, des courbettes de salons. Quand le fake rencontre les précieuses ridicules, ce qui est à peu de choses près notre situation hexagonale, je doute qu’il reste d’autres choix que le grand refus. C’est ici que les choses deviennent réellement passionnantes et créatives, pour risquer un mot délavé par la com des nains de l’open space. C’est ici que l’on commence à mesurer la profondeur d’une grimace.

Pharmacie de garde à Bordeaux centre un mardi soir

Pharmacie de garde à Bordeaux centre

  • Déambulation nocturne hier soir à Bordeaux  en direction de la pharmacie de garde. Destination le quartier des Capucins au-dessus duquel, depuis des semaines, l’hélicoptère de la police nationale finit sa journée tous les samedi. La pharmacie, à quelques mètres du marché couvert, se situe à mi-chemin entre la place de la Victoire et le quartier de la gare. A la recherche d’un anti-douleur, nous prenons place dans une queue exclusivement masculine. Les effluves d’éthanol sont prégnantes.

 

  • Dans son bunker, toutes grilles fermées, un homme seul assure le service. Quelques mots sont échangés à travers un interstice mécanique susceptible de se refermer au moindre problème. Le contact est ténu. Un individu dans un manteau crasseux, très agité, traverse la rue en notre direction. Il veut s’acheter des médicaments et a besoin d’argent, vite. Après avoir récupéré quelques pièces jaunes, il éructe en direction du groupe des insanités et disparaît à l’angle du boulevard. Un jeune homme d’une vingtaine d’années lui répond brutalement : « ce con, il demande de l’argent et insulte les gens ! ce gros con ! »

 

  • Quelques minutes après, un autre homme descend d’un vélo de location, indifférent à la queue, sous l’œil réprobateur de l’homme qui me précède visiblement très agacé, il demande sans ménagement au pharmacien qu’il ne voit pas de lui donner du fil dentaire et un « stéri » (1) L’échange est bref mais violent. De toute évidence, les deux hommes se connaissent. Suite au refus, il restera là quelques minutes, comme prostré, abattu, avant de s’éloigner. Des hommes s’insultent à l’arrêt de bus de l’autre côté du boulevard. Mon ami va s’acheter une portion de frites pour tromper l’ennui. Il revient avec un paquet de frites molles et grasses achetées un euro et cinquante centimes. Les frites sont réellement infectes, ce qui ajoute au tableau général.

 

  • Entre temps, le jeune homme juste derrière moi, soudain beaucoup plus calme, me glisse deux euros et cinquante centimes dans la main. La pluie est fine. Il veut que je prenne un « stéri » et que je garde la monnaie pour service rendu. Alors que j’achète enfin l’anti-douleur et le kit d’injection, un homme très abîmé s’adresse au petit groupe. Il tient un blouson sur ses épaules avec les noms de diverses drogues inscrits au dos. Personne ne répond. Un mélange de pudeur, de honte et d’agacement traverse le groupe éphémère. Un tatouage « satisfaction » est nettement lisible sur son bras droit. L’odeur est forte. Une fois le « stéri » acheté, la monnaie rendue, nous prenons congé à deux roues de ce petit attroupement devant les grilles fermées de la pharmacie de garde un mardi soir à Bordeaux centre.

 

  • Ce Bordeaux n’est pas celui de la foire au vin, ce n’est pas non plus le Bordeaux du Bassin et des quartiers bourgeois. J’imagine qu’il doit faire honte à son maire. Vous ne le verrez pas dans les plaquettes promotionnelles de la « belle endormie » chic et fric, il ne vous sera pas conseillé par tripadvisor.fr. Ces hommes existent pourtant, ils ont une histoire, un passé, un présent éphémère, un futur incertain. Etre le président d’une nation, le maire d’une grande ville, c’est être aussi le président et le maire de cette réalité-là. Il y a peu, Alain Juppé s’en prenait verbalement, dans la rue, à une association de quartier qui distribuait des boissons chaudes place de la Victoire. Il accusait en pleine journée ces bénévoles de faire le jeu de la misère, d’entretenir une forme de parasitisme. Au fond, de salir l’image de sa ville.

 

  • Entendu samedi après-midi, à l’occasion du défilé hebdomadaire, une femme bien mise à son mari : « regarde, certains gilets jaunes ne sont vraiment pas bien habillés ». Une jeune fille d’une vingtaine d’années, proprette, à sa copine, une calculatrice déjà sous le bras : « ça doit coûter cher en assurance tout ça. » Une mère de famille rue Sainte-Catherine tirant sa fille de dix ans par le bras : « viens ma chérie, ils sont dangereux ». Nous pouvons, c’est une certitude, vivre dans une société parallèle, consommer des offres culturelles rassurantes et bien léchées, enrober le tout de spectacle imbécile et d’une information bas de gamme. Nous pouvons, c’est une certitude complémentaire, nous sentir encore du bon côté du boulevard, avoir une lecture économique lucide, ne pas tomber dans un misérabilisme qui ne sauve personne. Nous pouvons penser que le niveau de complexité de nos sociétés, les chocs culturels, la paupérisation urbaine interdisent de mettre en avant des solutions simplistes. Mais l’on peut aussi, affectivement, ne pas en rajouter. Conserver une forme de pudeur, s’abstenir de faire la leçon au « peuple » comme cette ordure d’éditocrate à écharpe. Mesurer  son propos, éviter d’ajouter à cette somme de fragilité une morgue de vainqueur bouffi de sottise. Il est toujours possible de s’abstenir.

 

  • Mais notre époque, à travers ceux et celles qui visiblement la représentent, ne s’abstient plus. Elle dégueule de prétention. Mon ami et moi-même, sur le retour, avions ce même sentiment triste, celui de vivre dans une société extrêmement fragile, toujours sur le point de se fissurer inexorablement. Si les politiques ont une responsabilité, c’est aussi celle-ci : faire en sorte que le monde ne se défasse pas complètement, qu’il reste aux hommes des droits fondamentaux, que la vérité économique des uns ne soit pas la misère sociale des autres. Je ne parle pas ici de bons sentiments mais d’affects sociaux, ces affects fondamentaux sans lesquels nous cessons imperceptiblement de nous conduire comme des êtres humains en face d’autres êtres humains. J’ose le dire, notre époque me fait honte. Il faudrait pouvoir faire en sorte que cette honte soit combative, qu’elle ne suscite ni le désarroi, ni le renoncement. Et ce n’est pas tous les jours faciles.

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(1) Stéribox, kit d’injection vendu un euro en pharmacie.

L’hubris de Macron et de ses mainates

L’hubris de Macron et de ses mainates

  • L’argent n’est le nerf de la guerre que pour ceux qui déclarent la guerre à ceux qui en manquent. Le discours économique triomphe à partir du moment où l’on croit faussement que tous les problèmes posés par le gouvernement des hommes peuvent s’y résoudre. Ce qui est faux. Une vie d’homme ne sera jamais la somme de ses comptes, de ses dettes ou de ses crédits. Autant il est possible, et peut-être souhaitable, de ne pas être multi millionnaire pour avoir une vie digne, autant il est impossible de s’adresser aux hommes que l’on gouverne dans les seuls termes de l’économie, sans s’adresser aussi à leur dignité.

 

  • Dire d’un homme qu’il ne parle pas comme un gitan, utiliser le sobriquet « jojo » pour qualifier ce que l’on croit être le bas peuple, laisser entendre que des centaines de milliers de citoyens français sont manipulés par quelques puissances occultes, voilà pour l’indigne. L’économie vient après, bien après. Emmanuel Macron représente à lui seul, en partie à son corps défendant, une forme évidente de mépris, une morgue certainement inédite à ce niveau de responsabilité politique. Mais il serait injuste de ne pas voir dans ce mépris la signature d’une époque. A partir du moment où toute alternative est exclue, où le mot « révolution » accompagne la campagne publicitaire d’un nouveau shampoing, du dernier téléphone portable ou le livre de campagne d’un candidat, la réussite sonnante et trébuchante, celle des places et de la visibilité sociale ne peut plus être contestée par d’autres critères que ceux de la réussite. Circularité.

 

  • « C’est trop ». Si je devais trouver une formule pour résumer ce qui vient de la rue les samedi après-midi, ce serait celle-ci. Trop de privilèges, trop d’arrogance, trop de répression, trop de passe-droits, trop d’impunité, trop d’exploitation, trop de mépris. Ceux que le commérage caniche présente comme des extrémistes sont aussi ceux qui en appellent à une limitation des excès de l’homme. En face ? « Sky is the limit ». Une phrase démente prononcée par un dément aujourd’hui président de la république française. Un dément soutenu par une kyrielle de déments qui ne trouvent pas à redire à ces slogans de la démesure humaine, cette hubris dont les grecs savaient qu’elle était la cause de tous les maux. Otos et Ephialtès, ces géants qui entreprirent d’escalader le ciel, en subirent les conséquences, attachés à jamais à une colonne entourée de serpents. Ajoutons la chouette qui hulule au-dessus de la tête de ces démesurés.

 

  • Cette morgue, cette hubris contemporaine, n’entreprendra aucune escalade héroïque, n’ayez crainte. La mythologie agrémente la culture et il serait discourtois d’y faire référence pour autre chose que l’assaisonnement insignifiant d’une causerie lettrée. L’hubris moderniste est stérile, rabougrie, minable. Ces petites phrases lancées à la volée, reprises en écho par les nouveaux mainates du vide, éditorialistes pour l’espèce, n’expriment au fond que la démesure du moi. Emmanuel Macron est le fils de son temps, du fric et de la frime et il est vain d’aller chercher quelque chose de consistant derrière une vacuité qu’il ne peut pas, hélas pour lui, toujours étouffer.

 

  • Un peu de tenu lui hurle le peuple les samedi après-midi, un peu de décence. Mais au nom de quoi les vainqueurs de la lutte des places devraient-ils entendre cette adresse ? Qu’est-ce qui les oblige ? Regardez l’anti-barbare philosophe de Marrakech, pour quelles raisons se limiterait-il ? De serviles animateurs lui tendent encore le micro quarante ans après ses premières pitreries anti-totalitaires. Regardez cette animatrice d’un talk-show politique qui agrémente d’un « bam » buccal et d’un rictus débile les propos méprisants d’une chargée de communication, secrétaire d’Etat n’ayons peur de rien, à l’adresse d’un homme politique qui a recueilli plus de deux millions de suffrages dans une élection présidentielle. Qu’est-ce qui autorise cette petite femme à se comporter de la sorte ? Si des speakerines peuvent se permettre de telles sorties, pour quelle raison se plaindre d’un président de la République que affirme que les « gitans ne parlent pas comme ça » ?

 

  • Nous sombrons de moins en moins lentement mais sûrement. Nous sombrons pour être incapables de faire valoir un autre ordre de mesure que celui de l’argent. Nous mesurons tout ou presque en termes quantitatifs, incapables de faire encore valoir un ordre limitatif de la qualité. C’est aussi pour cette raison, comme un acte politique de première urgence, qu’il faut rappeler les cuistres à la réalité de leur cuistrerie. Emmanuel Macron occupe une fonction respectable mais l’homme est tout petit. Dans un paradoxe qui révulse les encore plus petits que lui, la défense de la dignité de la fonction vient moins de l’Elysée que de la rue. Les citoyens français attendent autre chose qu’une clique de baudruches qui se prennent pour Otos et Ephialtès mais qui n’auront droit, à la fin de cette sinistre farce, ni aux serpents ni à la chouette. L’Hadès des sans-noms leur ira très bien.