Thatcher-Macron contre l’idée républicaine

Thatcher-Macron le vieux contre l’idée républicaine qui renaît en France

 

 

  • Emmanuel Macron a quarante ans de retard, son âge. Il est né vieux. Incapable de comprendre l’évolution d’une société qu’il ne connaît pas, il se fantasme en révolutionnaire quand il n’est qu’un passéiste. Le modèle économique qu’il promeut est en train d’agoniser en même temps qu’il triomphe. Son école de l’hyperspécialisation est à contre courant de l’évolution du marché du travail dans lequel la disponibilité de l’esprit sera autrement plus importante demain que la spécialisation des tâches à accomplir, une spécialisation qui sera bientôt réservée exclusivement à l’intelligence artificielle et à la robotique. Sa réforme des retraites est incapable d’anticiper sur la question fondamentale du partage du temps de travail dans une société qui, structurellement, devra se penser au-delà du travail tel que nous le connaissons.  Retarder les départs à le retraite pour les uns, c’est retarder l’entrée sur le marché du travail pour les autres. Cette conception punitive à grand-papa est une nouvelle fois à côté de la plaque. Au lieu d’améliorer la qualité, de densifier les contenus, les plans de formation sont systématiquement allégés, ce qui rendra à terme les compétences humaines dérisoires à côté de celles des machines qui nous écraseront. Son individualisme startupper est plus proche des délires du self made man des années 80 que de la réalité des nouvelles formes de solidarité en 2019. Enfermé dans un univers mental dépolitisé, Emmanuel Macron va faire perdre un temps précieux à la France sous couvert de progressisme. La relégation de l’écologie politique dans une note en bas de page de la soumission au marché scelle aujourd’hui l’ineptie d’une politique qui a quarante ans de retard.

 

  • Aux antipodes de ces vieilles lunes économiques, l’idée républicaine a du vent dans les voiles. Ce qui est cohérent politiquement. Louis Blanc avait raison de dire, en octobre 1872, « qu’il n’y a que les idées qui mènent le monde ».  C’était vrai hier, ce le sera demain. Peu importe le gouvernement des hommes, l’incarnation et les pseudo ravalements de vitrines. Les idées d’Emmanuel Macron sont vieilles et elles seront balayées demain par une relocalisation de l’action politique effective, une prise en compte de l’écologie politique pour que nous puissions encore habiter la terre et une démondialisation sereine qui cherchera la décroissance de nos modèles économiques dans un équilibre des forces retrouvé. Tout le contraire du modèle aujourd’hui promu à grands renforts de modernisme et de disruption par des perroquets incapables de comprendre la nature exacte des transformations en cours. Formés il y a vingt ans dans le creuset d’un économisme rigide, les hommes et les femmes aujourd’hui au pouvoir ne comprennent rien à l’évolution de nos sociétés, à la volonté d’en finir avec le paternalisme politique, aux demandes démocratiques. Emmanuel Macron est arrivé trop tard, il s’est trompé d’époque. L’époque est en train de lui rendre la faiblesse de ses analyses politiques, lui le soi-disant stratège, le « philosophe en politique ». Au fond, il sera le Habermas de la politique française, celui qui a pris le mauvais virage au mauvais moment, celui qui n’aura rien compris au monde qu’il prétendait penser.

 

  • La défense du service public, et avec lui de la République, est un combat fondamental pour résister à cette vague rétrograde et autoritariste, autoritariste car rétrograde. Thatcher-Macron le vieux croit acheter le peuple avec trois bouts de ficelle, il se trompe lourdement. La prise de conscience des citoyens est autrement plus profonde que cela. On ne peut pas faire l’aumône pour survivre dans un monde qui vous expulse. Innombrables sont les citoyens français qui se sentent expulsés de leur monde, c’est aussi à cela qu’ils résistent avec force. Que la forme de cette résistance soit difficile à trouver, que les expressions de cette résistance se cherchent, que la violence physique soit aussi un chemin et une impasse, ne doit pas surprendre. La liberté politique est à reconquérir, pas à pas, étape par étape. Cela suppose un projet de résistance qui trouve dans l’histoire des modèles à réinventer. La République n’est pas une forme stable mais un idéal qui nous permet de mesurer l’ampleur de la trahison quand un parti usurpe sa valeur en conservant le mot. Il va de soi que ce projet de résistance de la République suppose l’articulation (plutôt que la convergence) de sensibilités politiques différentes, qu’il n’est pas le mot magique d’une réconciliation. Loin de là. Il est plutôt la condition d’une survivance de la conflictualité politique quand celle-ci est balayée par le tout marché.

 

  • Nous devons aujourd’hui faire droit politiquement à un au-delà du politique, ce que rend possible l’idéal républicain. Lorsque nous parlons du vide, du néant de nos pseudo démocraties marchandes, nous assumons des jugements de valeur, nous brisons le cercle de la sidération relativiste qui nous interdirait d’établir des échelles de valeur. Non pas pour faire de ces échelles les nouveaux alibis d’une domination politique mais pour réaffirmer que la politique ne peut se passer des échelles de valeur. Les technocrates bon ton acceptent ses hiérarchies dans leur vie privée mais les refusent démagogiquement pour le peuple dont il favorise l’abrutissement à condition qu’il soit rentable pour eux. Contre eux, nous assumons de faire un usage public de la raison et des jugements de valeur et nous livrons ces jugements aux jugements de l’opinion. L’usage privé de la raison est le tombeau de la liberté des peuples.

 

  • Thatcher-Macron sera balayé par l’histoire, il n’y a aucun doute à cela, mais les dégâts, en France, peuvent être considérables : pour notre système de santé, de formation, pour l’école, pour la cohésion nationale qui est en train de se déliter. La rhétorique de la « zadification » de l’opposition politique est un signe inquiétant de cécité, une défense à la fois grotesque et inquiétante. Elle est contraire à la raison que les républicains ont toujours cherché à rendre « populaire ». La République sociale de Jean Zay d’ailleurs plutôt que la République politique de Jules Ferry car la politique des politiques, nous le savons aujorud’hui aujourd’hui, a trop souvent tendance à se passer de la société qu’elle gouverne. Thatcher-Macron avait en partie raison : nous assistons au retour de la société civile. Mais pas la sienne, celle de ceux qui réussissent (sur quel modèle misérable de réussite d’ailleurs ?) mais celle de ceux qui ne sont justement rien. Cette société qui est en train, forte de son histoire, en France, de se lever contre le vieux monde, autoritaire et passéiste, mondialisé et abrutissant, destructeur de la nature et amnésique des leçons de l’histoire.  Les Républiques nationales, une idée neuve en Europe.