Please, a new little interrogation on the secret nature of the macronisme ?

Please, a new little interrogation on the secret nature of the macronisme ?

  • La Revue des deux mondes nous propose ce mois-ci un  joli dossier au titre alléchant : qu’est-ce que le macronisme ? Politique, société, économie, les maîtres à penser du président. Intellectuels, philosophes, écrivains, mondains, économistes, barbouilleurs de piges : la soupe aux feuilles de choux macroniste vous accueillent tous.  La bouillabaisse à côté du « macronisme » est un potage à la française. Pour être tout à fait honnête, j’ai failli me fendre de 15 euros et acheter cette dernière recette suressentielle. 15 euros tout de même ! Ma table de travail débordant déjà de toutes sortes de coupures de presse, de pelures journalistiques, d’épluchures de magazines, d’écorces de livres, je me suis ravisé. La bouillie préparée par les maîtres queux des fausses questions, ces Sherlock Holmes macronistes de l’essence cachée, confuse et réchauffée à intervalles réguliers, m’a déjà suffisamment coûté en légumes de presse périmés. Il est temps d’en finir et de tout envoyer au compost.

 

  • Soyons sérieux deux minutes – même si le sujet ne s’y prête guère – qu’est-ce que le macronisme si ce n’est la résultante peu ragoutante de cette soupe aux feuilles de choux à laquelle La revue des deux mondes ajoute en octobre un after eight. Y a-t-il encore des goûteurs pour prendre ce vilain minestrone au sérieux ? Un jour viendra peut-être où des archéologues désœuvrés  se pencheront sur le bol Macron en se demandant gravement de quel potage le macronisme était-il le fond ? Un détour par le silo à compost intellectuel ne sera pas superflu. Comment un tel délire, journalistique, médiatique, analytique, épileptique  a-t-il pu voir le jour ? A partir de quelle débâcle intellectuelle ? De quelle faute de goût ? De quelle anesthésie du palais de l’Elysée ?

 

  • Oui mes amis de la critique végétalisée, j’ai discrètement pouffé en découvrant ce nouveau titre : qu’est-ce que le macronisme ? Politique, société, économie, les maîtres à penser du président. Discrètement, pour ne pas attirer à moi la fameuse estafette qui ramasse les fous. Est-ce partagé ? D’autres ont-ils déjà éprouvé un affect de cet ordre ?  Existe-t-il encore des esprits carnassiers pour comprendre que ma recette du soir – la soupe aux feuilles de choux macronisées – est autrement plus consistante que ces pseudo interrogations bouffonnes sur son essence cachée ? Tant qu’il y aura des imbéciles pour avaler la soupe sans broncher en cherchant le plus sérieusement du monde ce qu’il y a derrière ce vide d’autre que ce vide lui-même, je leur passerais les plats dans l’attente de  l’explosion finale.

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« Dossier : Qu’est-ce que le macronisme ?
→ Rencontre de Ricœur et de Macron par Olivier Mongin
En 1999, Emmanuel Macron accepte de travailler comme assistant éditorial de Paul Ricœur. Olivier Mongin explique l’influence intellectuelle du philosophe sur l’étudiant et son rôle d’éducateur politique auprès du futur président.

La place de Paul Ricœur dans la philosophie contemporaine par Olivier Abel
Olivier Abel
définit la pensée de Paul Ricœur, son style et ses grands thèmes de
prédilection (la question du mal, le langage, le temps).

Le prince et la République par Philippe Raynaud
Emmanuel Macron a rédigé un mémoire de maîtrise sur Machiavel. Philippe Raynaud se demande en quoi les concepts machiavéliens peuvent ou non illustrer l’action du président.

L’enfant caché de Giono par Franz-Olivier Giesbert
Giono figure au panthéon littéraire d’Emmanuel Macron, aux côtés notamment de
Gide et Camus.

Mitterrand, l’avenir de Macron ? par Laure Adler
Mettre en parallèle François Mitterrand et Emmanuel Macron permet de dégager
d’intéressantes similitudes et dissemblances.

Le macronisme est-il schumpétérien ? par Annick Steta
Maladroitement assimilée aux théories de Joseph Schumpeter, la philosophie économique d’Emmanuel Macron puise à d’autres sources, comme l’analyse Annick Steta. »

 

 

Critique mélancolique

Critique mélancolique

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  • La partie du Bien est perdue, nous jouons désormais sur l’échiquier du Mal, le seul terrain encore praticable. Il serait grand temps de comprendre que la dénonciation du Mal par le Bien a vécu. Elle ne fait plus qu’un avec le déploiement d’une logique qui met à mort, depuis des décennies, toute forme de subversion et de transgression. Quelle forme de discours et d’action peut encore subvertir un ordre hégémonique qui prétend abolir les distinctions symboliques qui nous permettaient, hier encore, de nous situer ? Cette question interroge profondément l’histoire de la pensée critique en Occident et mérite, à ce titre, nettement plus qu’un court texte. Il faudra s’y atteler le moment venu. Mais pas ce soir.

 

  • Nous ne sommes pas dans une période de crise de la critique. Bien au contraire. La critique est notre nouvelle vulgate. Ce que nous ne parvenons plus à faire – ou au prix d’un effort incommensurablement plus violent pour l’esprit que ce qu’à pu connaître Marx au XIXe siècle, autrement plus désespérant aussi  – c’est arracher la critique aux dispositifs de sa capture. Capture et non récupération comme il était d’usage de l’écrire dans les années 70. L’idée d’une récupération de la critique suppose que quelque chose ait été produit pour être ensuite récupéré. Mais un trou noir, celui-là même que créent aujourd’hui nos modèles de simulation, ne récupère pas la lumière après que celle-ci ait été émise. Il la capture radicalement. Faire comme si nous pouvions encore émettre une critique sans tenir compte de cette radicale nouveauté nous condamne à errer dans une forme vidée de toute substance. Ce qui apparaît comme évident à celui qui pratique cette lutte constante pour poursuivre l’héritage de la pensée critique, à savoir l’effort colossal qu’il faut produire pour émettre encore de légers scintillements négatifs, doit être pensé. Ce sont justement ceux qui font le moins cas de cette situation inédite (situation qui marque la décomposition de la pensée dite « critique » en Occident) qui feront demain de la critique du spectacle, de la domination, de l’aliénation, la vulgate la plus indiscutable du temps. Mélancolique d’une forme critique qui se meurt, nous cherchons à faire de la conscience de cet état une arme fatale tournée contre les dispositifs hégémoniques.

 

  • Disons le autrement,  loin des vertiges pourtant décisifs de l’abstraction sans laquelle on se condamne à mesurer la hauteur des œufs au plat sous le grand chapiteau de la critique du spectacle. D’aucuns pensent aujourd’hui qu’il est de première nécessité de constituer un nouveau média pour peser négativement sur des logiques de domination qui accapareraient les moyens de la violence symbolique. La formation d’un tel média (actionnaires, capital, publicités etc.), située du côté du Bien, aurait pour tâche d’affronter le Mal sur son terrain. Autrement dit, l’idée est de faire la même chose mais en mieux. La mélancolie critique sait pourtant qu’à ce jeu-là, la partie est déjà perdue. Une telle création ne fera que confirmer l’hégémonie de la forme médiatique sur tout le reste, accréditant l’idée, elle-même hégémonique, qu’il n’y a pas d’autres issues qu’une lutte à armes égales. Serait-elle défaitististe ? Bien au contraire. Elle accepte que sur ce terrain-là, il n’y a pas d’issues. On ne saura jamais si la sottise des présentateurs d’une chaîne d’information d’Etat en continu n’est pas le meilleur argument pour mettre en échec les représentations du monde qu’elle promeut ? Encore faut-il piéger cette sottise, lui tendre un miroir fatal. Non pas celui du Bien mais sa propre image, comme le reflet de Méduse sur le bouclier d’Athéna.

 

  • Nous construisons des pièges radicaux, des stratégies fatales, car insolubles pour l’ennemi. En acceptant objectivement notre défaite, nous nous donnons les moyens de la refuser ironiquement. Ces stratégies restent incompréhensibles dans la logique de la pensée critique héritée des Lumières. C’est qu’elles prennent le parti du Mal. Non pas par goût du paradoxe ou sous l’effet d’une bizarrerie temporaire mais après avoir fait le diagnostic douloureux que la substance originelle de la critique au nom du Bien avait disparu. Croire que l’on peut conjurer cette disparition en faisant apparaître de nouveaux champs de positivé, plus puissants, plus efficaces, c’est se condamner à réussir comme les autres. L’idée d’échouer comme personne d’autres avant nous, dans un crépuscule bleuté et hypnotique, me paraît nettement plus réjouissante pour l’esprit. Plus transgressive aussi.