Notre-Dame-des-Landes – Donald Trump se vante aussi de baiser les zones humides
- Feu vert ! « Virez les zadistes », « dégagez les parasites », « envoyez les CRS », « il faut en finir. » Combien de crétins moyens subliment leur vie diminuée en réclamant justice derrière leur petite lucarne au profit de Vinci et du bétonnage universel ? Combien de soumis, moulés dans la laideur urbaine de leur congénital mauvais goût, exigent sans délais de « nettoyer le dépotoir de la ZAD » ? Combien d’eunuques à bagnoles ressentent enfin un frissonnement dans le bas ventre en apprenant que la justice administrative vient de contredire les recommandations du rapporteur public défavorable au projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes ? Nous sommes arrivés – non, sans efforts je le concède, en matière de dressage rationalisé, de servilité consentie et de crétineries domestiques – à un tel point d’abrutissement collectif que les promoteurs de demain auront tout loisir de bousiller le peu qu’il reste à condition de mettre en avant les bénéfices pour l’économie du pays. Manuel Valls, brandissant sa troisième couille, nous avait pourtant prévenu : “Il est hors de question de laisser un kyste s’organiser.” (23 novembre 2012).
- Il est remarquable d’apprendre, en lisant le communiqué de presse de la cour d’appel de Nantes (14 novembre 2016), que des roseaux entoureront la cuve double épaisseur de traitement des eaux usées sur le site de l’aéroport. « La Cour a aussi estimé que le réaménagement de l’aéroport actuel de Nantes-Atlantique ne constituait pas une solution alternative satisfaisante. » (dixit le texte) Sens-tu le roseau pensant, dur, long et flexible, au plus près de ta cuve ? Qu’est-ce qui est aujourd’hui satisfaisant? Respirer de la gomme de pneus et des particules fines, est-ce satisfaisant? Pouvoir aller faire bronzette à Djerba en voyageant en charter depuis Notre-Dame-des-Landes pour quarante euros serrés comme des moules en caisse, est-ce satisfaisant ? Pisser en meute un jour de transhumance sur les aires Vinci autoroute, est-ce satisfaisant ? Déverser des tonnes de plastique sur les quatre voies de la liberté, est-ce satisfaisant ? Dévaler des pentes enneigées aux canons polluants pour le plaisir incomparable de glisser encore au mois d’avril, est-ce satisfaisant ? Existe-t-il d’ailleurs des « solutions alternatives satisfaisantes » si vous nourrissez quelques doutes légitimes sur les grands projets de la satisfaction générale ? L’effort pour trouver des alternatives satisfaisantes aux plus basses satisfactions humaines n’emporte pas les suffrages. C’est aussi cela le silence de la majorité.
- Reste l’aboiement généralisé qui, au nom de la justice, du peuple et de la démocratie, exige Vinci. Séance tenante. Le beau texte de La Boétie, version zadiste : « Pauvres et misérables peuples insensés, nations opiniâtres en votre mal et aveugles en votre bien, vous vous laissez emporter devant vous le plus beau et le plus clair de votre revenu, piller vos champs, voler vos maisons et les dépouiller des meubles anciens et paternels. » (1) Que vaut en effet une zone humide et deux trois grenouilles à côté d’un cul bien bronzé à Sousse pour la modique somme de quarante euros ? Que vaut une baraque de guingois à côté d’un lotissement Bouygues équipé de la fibre « carrément vôtre » dans une zone aéroportuaire dernier cri ? Sans parler des meubles anciens et paternels comparés aux étagères en aggloméré d’Ikea, trop branlantes à l’usage pour supporter plus qu’une bougie parfumée à la vanille de synthèse ? Les petits légalistes beuglant en goguettes montent au créneau. Rendez-nous le béton, c’est du droit ! Vite, du kérosène et de la vidange, c’est de la démocratie ! Les caniches de la soumission collective twittent à s’en défoncer le clavier. « Virez les zadistes », « ça suffit maintenant », « la loi c’est la loi », « nettoyez le dépotoir de Notre-Dame-des-Landes ».
- Cette armée de scribouilleurs démocrates exigent au plus haut sommet de l’Etat que justice soit rendue. N’oubliez pas, chers amis du boccage, qu’il n’y a pas d’autres alternatives satisfaisantes. Nous ne sommes pas à l’heure des alternatives insatisfaisantes. Mieux, nous ne sommes pas à l’heure des alternatives tout court. Voyons plus grand, plus loin, plus haut. Toute une région attend cela, le grand quart ouest, la côte atlantique, tout un peuple. Un aéroport flambant neuf avec un super mall Vinci-Subway-Ikea-SFR. Make the big west great again ! Et dire que la gauche morale s’insurgeait, il y a peu, lorsque que Donald Trump, le super bétonneur, se vantait de baiser les zones humides.
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La Boétie, Discours de la servitude volontaire.