Le vulgaire polémiste

Le vulgaire polémiste

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(vulgaire polémiste à lanterne)

  • Parmi les innombrables façons de disqualifier sans effort un travail de l’esprit ou de la plume, celle-ci, récurrente, me vient à l’esprit – ou à la plume si j’avais le talent d’un Daumier ou d’un Grandville : vous n’êtes qu’un vulgaire polémiste. Disposé à la guerre (polêmikôs), vous détruisez sans construire, vous humiliez sans contrepartie, vous ne jouez pas le jeu du dialogue et de l’argumentation. Pour la visée libérale en effet, la polémique est toujours vulgaire, basse et vile. Démosthène, dans les IIIe Philippique, regrette déjà la disparition à la tribune du franc-parler (parrhèsia) des esclaves et des étrangers à la cité grecque. Je ne peux m’empêcher de penser ici à cette éditrice qui me faisait remarquer, sous la forme d’un conseil très amical, que j’étais un peu trop polémique. Ne vous abaissez surtout pas à polémiquer mes amis, vous risqueriez en effet d’attribuer une valeur à ceux qui ne le méritent pas. D’ailleurs, le polémiste n’attends que ça. Surtout ne lui donnez pas ce plaisir. Sevrez-le de réponses, ignorez-le, vous êtes bien au-dessus.

 

  • L’exclusion du polémiste du champ intellectuel pour le rabattre sur les pratiques indignes de la foule (vulgus) est une conséquence directe de la construction libérale d’un individu qui n’a pas de comptes à recevoir des autres. De quel droit – l’individu libéral est avant un juriste de salon – le polémiste viendrait, sans ménagement, déranger son confort intellectuel ? Alors qu’il vendait en paix sa camelote spirituelle, qu’il la consommait en toute quiétude, voilà que le polémiste vulgaire cherche à l’humilier en prenant pour cible la légitimité de ses choix. Il monte sur scène et présente les produits issus du consensus libéral sous un jour étonnant, comme indignes. Son intervention critique redéfinit ainsi l’objet jusque là consommé sans arrière-pensées par des individus sûrs de leur jugement et de leur bon goût. Paradoxalement, le polémiste n’est pourtant pas étranger à la société libérale dans la mesure où il introduit une concurrence ouverte des discours. Ce qui le rend monstrueux  – terme retenu, nous le verrons, par Michel Foucault pour le disqualifier – c’est qu’il est libéral pour rien. Celui qui recherche la guerre des discours, l’affrontement et la destitution du consensus libéral, en un mot celui qui active le problème politique, n’a rien à proposer. Contrairement au libéral qualifié, qu’il soit libertaire, humaniste, philosophe, progressiste, démocrate et j’en passe, le libéral pour rien, le libéral sans qualité,  ne vous donnera aucun droit à la sortie. Après son intervention, vous n’aurez rien gagné. C’est que le polémiste vulgaire vise moins l’affirmation que la destitution. Lui au moins prend la liberté au sérieux.

 

  • Dans un texte au titre savoureux, « Les monstruosités de la critique » (Dits et Ecrits), Michel Foucault, libéral qualifié, écrit : « Les impostures au sein de l’espace critique sont comme des monstres au sein du monde vivant : de simples possibilités, certes, et néanmoins cohérentes. » (1). Un libéral qualifié se doit de défendre ses droits, ceux de son estrade, de son micro ou de son strapontin. Les élèves savent cela très bien. Pour la visée libérale, la liberté intellectuelle des uns s’arrête là où commence celle des autres. D’où la difficulté, cela dit en passant, d’humilier la sottise juvénile ou sénile qui revendique son droit inaliénable à ne pas être prise pour cible. D’où la difficulté d’enseigner aujourd’hui plus qu’hier. La critique « honnête » pour Foucault « laisse une place à l’autre ». Critique pacifique, de coexistence, de respect mutuel. Du texte original, elle défendra l’esprit et la lettre. Lecture courtoise, tolérante, charitable, pédagogique. Lecture qui s’accommode sans mal des nouvelles règles de la normalité : eugénisme d’une langue feutrée, avortement thérapeutique des déviances stylistiques, des formes hybrides, des excroissances épithétiques, des cruelles invectives, liposuccion syntaxique et autres ablations sémantiques. Bref langage de journaliste.

 

  • Michel Foucault, qui ne peut se satisfaire d’une simple condamnation morale, décrit les textes polémiques comme « des petits textes aux jambes tordues et aux yeux torves ». Que faire de ces anomalies? « On ne cherchera plus à leur répondre ou à faire taire leur tapage, mais à comprendre la raison de leur difformité, de leur claudication, de leur regard aveugle, de leurs longues oreilles. » (2)  L’usage du terme « monstruosité », chez un libéral qualifié perçu comme un redoutable ennemi des normes sociales, ne doit pas surprendre. Michel Foucault évite la condamnation morale mais retient la difformité. Le libéral qualifié, héros de la critique  instituée, nous rappelle le bon agencement, le juste équilibre des organes de presse. Foucault ne jouera pas dans la cour des monstres. Son texte n’aura ni grandes oreilles, ni regard aveugle, ni claudications. « Comprendre la raison » de la polémique, une tâche autrement plus orthopédique.

 

  • Le libéral hautement qualifié, sûr de son droit à ne pas être humilié intellectuellement, attribue au polémiste le mauvais rôle. « Le polémiste, écrit-il dans un autre texte, s’avance bardé de privilèges qu’il détient d’avance et que jamais il n’accepte de remettre en question. » (3) Sans foi ni loi, le vulgaire polémiste ne jouerait pas le jeu de la vérité. « Il faudra peut-être un jour faire la longue histoire de la polémique comme figure parasitaire de la discussion et obstacle à la recherche de la vérité. » Obstacle parasitaire ? De quel purisme ? Le dialogue libéral aurait-il trouvé son nuisible ? Le polémiste peint en ver solitaire. Invoquant le polémiste comme d’autres invoquent le malin, le libéral qualifié défend ses droits à la parole bien écrite et bien dite au nom de « la recherche de la vérité. » Le polémiste, forcément vulgaire, serait l’homme des procès et du faux. Mais la guerre n’est pas le procès, la lutte n’est pas la condamnation, l’affrontement n’est pas le verdict et le guerrier n’est pas le juge. La guerre des textes et des idées ne condamne personne et le texte qui entre en lutte ne se confond pas avec son auteur. « Comme dans l’hérésiologie, la polémique se donne pour tâche de déterminer le point de dogme intangible, le principe fondamental et nécessaire que l’adversaire a négligé, ignoré ou transgressé ; et dans cette négligence, elle dénonce la faute morale. » Mais n’est-ce pas ici le libéral qualifié en personne, ce sujet de droit qui refuse d’être jugé, qui associe polémique et jugement moral ? L’inquisiteur veut la rectification de l’âme égarée quitte à brûler le corps. Que veut le polémiste vulgaire ? La morale, le bûcher ou simplement la lutte ? Qui fait planer l’ombre de la mitre et le retour à la normalité débarrassée de son ver parasite ?

 

  • « On gesticule : anathèmes, excommunications, condamnations, batailles, victoires et défaites ne sont après tout que des manières de dire. » Tout comme le dire de cette façon et pas d’une autre. La belle affaire. La polémique serait-elle stérile ? Encore faut-il définir le niveau acceptable d’acidité de l’engrais. Après le monstrueux et le difforme, le fécond et le stérile. Les libéraux qualifiés sentent confusément le danger qu’il y aurait à laisser trop de place au polémiste vulgaire, au méchant ironiste, au vilain satire. Le risque de se voir diminuer dans leurs prérogatives de droit. Alors ils brandissent en dernier recours l’argument de la violence réelle. Le vulgaire polémiste ferait le jeu de la violence réelle. « Il serait dangereux, conclut définitivement Michel Foucault, de croire que l’accès à la vérité puisse passer par de pareils chemins et de valider ainsi, fusse sous une forme seulement symbolique, les pratiques politiques réelles qui pourraient s’en autoriser. » L’histoire récente des conflits sociaux nous montrent justement l’inverse. Moins nous sommes capables d’entrer en lutte dans l’ordre symbolique des discours, plus les monstruosités de la critique sont exclues de la culture explicite, c’est-à-dire publique, plus la violence réelle se déchaîne. Le polémiste, une fois circonscris et châtié, empaillé dans sa nature monstrueuse et aberrante, devient l’alibi général d’une indifférence à la lutte. N’oublions pas que le consensus libéral repose avant tout sur la paix des commerces une fois mise en sourdine la guerre des consciences, une fois les feux du polêmikôs éteints.

 

  • Le terrain de l’affrontement intellectuel, réduit à n’être plus qu’une mise en scène orchestrée par le spectacle, recule. La vague lénifiante des discours garanties sans polémique forme aujourd’hui une petite armée de soldats de la paix des commerces. Journalistes, éditeurs, professeurs, formateurs, faiseurs, au nom de l’imprescriptible droit à ne pas humilier intellectuellement, anéantissent les luttes politiques. Les innombrables défenses que nous dressons contre la violence symbolique – la polémique en fait partie – se paiera d’un prix autrement plus élevé que le sentiment, certes désagréable, d’avoir été pris pour un con par le libéral qualifié de saison, celui qui parle bas, sans polémique.

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(1) Michel Foucault, « Les monstruosités de la critique », Dits et Ecrits, 1971.

(2) Loc. cit.

(3) Michel Foucault, « Polémique, politique et problématisation », Dits et Ecrits

 

 

Donald Trump, l’avant-gardiste

Donald Trump, l’avant-gardiste

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  • Ne juger pas trop vite Donald Trump. L’homme est en avance sur votre temps. Il est l’avenir. L’osmose parfaite entre démocratie et spectacle, show politique et peep show. Catch, trash et cash. Il est l’homme nouveau, le sens de l’histoire. De qui vous moquez-vous en raillant l’esprit du temps ? Qui croyez-vous convaincre en méprisant votre futur ?  Qui pensez-vous dépasser en niant l’inexorable marche de l’histoire ? Relisez Hegel et son histoire de Geist, l’Esprit qui déboule en cinquième sur les grands axes du temps. De quoi trouver dans Donald Trump une dimension qui vous échappe, poussières vintage que vous êtes sur les bas côté de la quatre voies historiques. Du Watergate au Pussygate, Donald Trump a pour nom progrès, croissance et développement. Regardez bien sa gueule et vous verrez la vôtre dans vingt ans.
  • On aura beau critiquer les USA, leur faire la nique morale en lisant la dernière interview de Marcel Conche dans le magazine Philo Plus sur une terrasse à Saint-Malo, ils restent les meilleurs et pour longtemps. Ils dessinent au présent des contours que vous devinez à peine. Trop occupés à bêler sur des opinions vagues, la tête dans le cul de basse fosse de trois médiatiques franchouilles – polémistes et intellectuels paraît-il – vous passez à côté de ce grand visionnaire. Donald Trump a baisé des femmes grâce à son argent et sa notoriété ?  Donald Trump s’est fait baiser par un enregistrement en dépit de son argent et de sa notoriété ? Donald Trump est réversible, irréfutable, par-delà le vrai et le faux. Il est en somme le premier candidat de la télé réalité, du catch et du porno. Synthèse encore imparfaite bien sûr, prototype, il gagnerait à être encore plus faux que le faux ou plus vrai que le vrai. Au choix, peu importe. A l’image du baron de Münchhausen, il tire sur sa vraie fausse moumoute pour s’extraire du bourbier quand on l’accuse. Encore trop réaliste Donald Trump. Les suivants feront semblant de tirer sur leur fausse vraie moumoute pour mimer la sortie. Soyons patients.

 

  • Donald Trump reste pourtant un pionnier, un avant-gardiste de premier ordre. Il a compris que tout partait du média, que tout y retournait. Sans reste. Mais à la différence de Reagan ou de Schwarzenegger, il n’a pas fait du cinéma avant de faire de la politique. Sans cesser de faire de la télé realité, du catch et du porno, il a découvert que c’était aussi de la politique. On lui a peut-être soufflé. Donald, regarde ce que tu fais, c’est de la politique ! «Je n’arrive pas à croire que je dis ceci à propos de moi-même, mais je suis devenu un politicien…» – Donald Trump. Les surgeons ne Donald Trump ne se poseront plus la question.

 

  • Eric Zemmour fait-il l’apologie du terrorisme ? Michel Onfray, philosophe, qu’en pensez-vous ? Anne Hidalgo s’engage-t-elle à fond pour les JO ? « Comment peut-elle satisfaire son pays si elle ne satisfait pas son mari ? (Donald Trump à propos d’Hilary Clinton). Voyez-vous la différence de niveau ? Mesurez-vous pleinement ce qu’est une avant-garde ? Appréciez-vous la façon dont Donald Trump résume son temps, l’exprime, le sublime, le dépasse ? C’est aussi pour cette raison que vous jetez le mauvais œil sur les nouveaux arrivages venus d’outre-Atlantique. Le mauvais œil de la culpabilité et du désir mêlés. Vous marchez droit mais vous tournez la tête à la vue du premier néon rose étoilé. Vous lisez en cachette les meilleures citations de Donald Trump en piles à côté du comptoir pour le petit frisson. Je vous comprends français.  Zemmour, Onfray, Hidalgo… pourquoi s’emmerder avec des pipes froides quand d’autres sont biberonnés au peep show ?

 

L’identité n’est qu’un « branle plus languissant »

L’identité n’est qu’un « branle plus languissant »

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  • Comment critiquer la décadence sans devenir aussitôt, par une simple réversion des signes, un défenseur de l’ordre, un vulgaire réactionnaire ? Non pas que je tienne le mot réactionnaire pour offensant. Bien au contraire. Mais les affects qu’il mobilise  n’ont rien à voir avec les problèmes posés par le travail de la critique aujourd’hui. Il y a des positions critiques tenables, d’autres qui le sont moins, et cela n’a rien à voir avec l’attribution d’un certain coefficient de vérité ou d’identité, les deux notions ayant tendance aujourd’hui à se souder. Derrière la question canoniquement nietzschéenne (« quelle dose de vérité un esprit peut-il supporter ? ») se cache cette autre : quelle dose d’identité un esprit peut-il supporter ?
  • Il n’y a pas d’identité stable mais des modes d’investissement affectif des discours plus ou moins supportables. Ce n’est pas parce que « nous et notre jugement, et toutes choses mortelles, vont coulant et roulant sans cesse » (1) que les échanges obscènes de signes, leur monstrueuse promiscuité, sont supportables. Ayant pris de vitesse les théories qui critiquaient les rapports de domination symboliquement accrochés à une référence intangible (Dieu, Etat, Loi, Père…), le capitalisme analphabète (et demain analfabète) est autrement plus efficace que toutes les déconstructions académiques. Si le monde pour Montaigne était « une branloire pérenne », le nôtre est une branlette éphémère. L’instabilité permanente fait partie du développement logique d’un système d’échange par permutation et indifférenciation de tous les signes. La succession des crises sape progressivement ce qui tenait lieu hier de références indiscutables. De là le sentiment d’un effondrement irréversible. Loin de la joie vacillante de Montaigne, le sable de l’impermanence, cher à l’auteur des Essais, ne réjouit plus grand monde.
  • Dans ce flux de prurits mondialisés, d’aucuns font état d’un déclin de la pensée dite critique face aux attraits des valeurs immuables. Comment expliquer le sentiment de ce déclin dans une situation de crise objective ? Parmi les mobiles de l’action humaine : l’espoir. Aucune pensée critique ne peut s’épanouir sans espoir.  Ce n’est pas un mince paradoxe. C’est dans une période de forte croissance économique que Jean-François Lyotard écrivait ceci : « Voici une ligne politique : durcir, aggraver, accélérer la décadence. Assumer la perspective du nihilisme actif, ne pas en rester au simple constat, dépressif ou admiratif, de la destruction des valeurs : mettre la main à la destruction, aller toujours plus avant dans l’incrédulité, se battre contre la restauration des valeurs. (2) »  Qui veut encore lire de telles sentences ? Et d’ailleurs, si le capitalisme analphabète et acéphale parle, et rien n’est plus bavard que sa publicité, il semble bien (en apparence)  tenir ce programme : « se battre contre la restauration des valeurs. » La décadence n’est-elle pas suffisamment avancée ? Ne voyez-vous pas que le processus est en lui-même irréversible ? Qu’avons-nous à faire d’une doublure théorique de la grande liquidation ?
  • Faute d’avoir su –  ou pu – convaincre sur ce point crucial, les entrepreneurs critiques  de la décadence se sont périmés en un clin d’œil. « Marchons vite et loin dans cette direction, soyons entreprenants dans la décadence, acceptons par exemple, de détruire la croyance dans la vérité sous toutes ces formes. (3) » Détruire l’identité, détruire les valeurs, dites-vous ? Profitons-en pour liquider la Sorbonne restaurée pour les touristes étudiants ou chinois, ne manqueront pas d’ironiser les nostalgiques du marché droit.  Si le discours de la pensée critique est bien le discours du capitalisme rendu manifeste, l’espoir ira investir des valeurs restaurées, des identités stables.

 

  • A terme, il va de soi, les nostalgiques de la patrie et de ses bruits de bottes ne reconnaîtrons pas la rage de leurs enfants, de leurs petits-enfants. Saisis par des ignorants qui traînent leurs grandes idées dans la rue, ils ressembleront aux pères bafoués dans Les Possédés de Dostoïevsky. La sainteté de la nation, de l’identité, de la patrie ? « Vous la retrouverez sur le marché, méconnaissable, roulée dans la fange, toute cabossée et biscornue, sans plus de proportions ni d’harmonie, tel un jouet dans les mains des enfants. (4) » Succès des bricolages identitaires pour les ras du bol.  Quelque chose à quoi se raccrocher, une branche, un idéal régulateur, un bolet de cidre. Plutôt n’importe quelle valeur que pas de valeur du tout puisque c’est cela que nous promet le capitalisme schizo à la fin de la funeste histoire. Si la « vérité » de la pensée dite critique et la « réalité » du capitalisme se confondent, les restaurateurs de l’ordre, contre les déconstructeurs vieillissants et largués,  chercheront le retour de bâton dans des identités qui ne branlent plus.
  • Par quelle subtile séduction pourrions-nous, à cette heure de l’insignifiance, rattacher encore ensemble espoir et critique ? Par quel bricolage affectif l’espoir peut-il circuler dans la critique, passer à travers le soupçon, se propager dans les lignes de fracture d’une mise en crise de l’institué quand tout fout le camp ? Les hommes sont-ils à ce point déniaisés qu’ils auraient perdu le désir de l’être davantage ? Que cherche-t-on dans la critique ? Redoutables questions. Peut-être un certain type d’investissement affectif des discours. La question de savoir si oui ou non la critique est fondée (sur quelle référence ?) est toujours secondaire. Ce que nous recherchons ? Une relation non indifférente à nous-mêmes, le contraire d’une permutation indifférente des signes à l’horizon indépassable d’un irréversible essorage sémantique.
  • La « ligne politique » décrite par Lyotard et la ligne aplatissante du capitalisme analphabète sont pourtant bien antinomiques. La première « durcit », la seconde liquéfie.  La première « aggrave », la seconde occulte. La première « accélère », la seconde radote. Les confondre c’est accepter, dans la défense nécrosée de valeurs strictement défensives, la pétrification définitive de l’esprit.

 

  • Bourrins identitaires, détracteurs forcenés des branlettes éphémères, ras du bol, partisans, vous n’aurez pas la peau des branleurs languissants.

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(1) Montaigne, Les Essais (ed.1580)

(2) Jean-François Lyotard, Petite mise en perspective de la décadence et de quelques combats à y mener (1976)

(3) Loc. cit.

(4)Fédor Dostoïevsky, Les possédés, t. I.